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20 mars 2016 7 20 /03 /mars /2016 14:19

Pour votre information

 

Tribune de Nicolas Sarkozy publiée le 18 mars 2016 dans Le Figaro portant sur le choix de François Hollande de commémorer la fin de la guerre d'Algérie le 19 mars

 

Pour l'ancien Président de la République, retenir cette date revient à considérer que la France était « du mauvais côté de l'Histoire ».

 

La France et l’Algérie partagent une Histoire commune. Une Histoire qui a duré plus d’un siècle. C’est une réalité.

De cette Histoire, la mémoire collective de nos peuples a retenu les hautes figures d’Abd el-Kader, du duc d’Aumale ou encore l’héroïsme des tirailleurs algériens tenant tête à l’armée prussienne sur le champ de bataille de Wissembourg.

Des Français d’Algérie, de toutes origines, de toutes religions, de toutes conditions, ont donné leur sang pour la France, en 1870, en 1914-1918, en 1939-1945 et plus tard lors de conflits extérieurs. Ils sont tombés pour la gloire et l’honneur du drapeau tricolore.

Des Français ont consacré leur vie à l’Algérie, ils ont construit, cultivé, embelli, et surtout aimé ce pays qu’ils considéraient comme le leur. Des centaines de milliers d’entre eux reposent toujours en Algérie.

Mais cette Histoire est aussi faite de violence. Violence de la conquête, violence des révoltes contre cette même conquête, violence de l’exploitation et de la colonisation, violence des opérations de « pacification » et violence enfin de la guerre d’Algérie, qui avant d’être une guerre d’indépendance fut aussi une guerre civile. Cette Histoire-là est douloureuse car, comme dans tout conflit, la violence fut aussi, hélas, des deux côtés.

 

Depuis la fin de ce conflit et les accords d’Evian qui tentèrent de trouver une issue négociée à huit ans de guerre, la France et l’Algérie ont essayé d’envisager ensemble un autre avenir.

 

Un avenir qui passe nécessairement par cette mer Méditerranée commune aux deux pays. Les relations économiques n’ont jamais cessé et si en 1962 plus d’un million de Français d’Algérie ont rejoint la France, plus d’un million d’Algériens vivent aujourd’hui dans notre pays. Si l’Histoire de nos deux pays n’est plus commune, elle reste, on le voit bien, largement partagée par nos deux peuples.

 

Pour autant les anciennes blessures ne sont pas toutes cicatrisées. Il revient donc à chacun de nos peuples de regarder son Histoire en face. Si en 2012, au camp de Rivesaltes, Président de la République, j’ai reconnu, au nom de la France, la responsabilité de la République dans la tragédie des harkis, je ne me suis évidemment pas permis de m’exprimer au nom de l’Algérie. C’est à ce pays souverain et à son opinion publique qu’il reviendra de faire, sur cet épisode de son Histoire, le travail de mémoire nécessaire pour qu’un jour les fils de harkis puissent librement s’interroger sur le sort qui a été réservé à leurs familles et à leur enfance.

 

Il n’en demeure pas moins qu’il faut aussi trouver les mots pour désigner ce passé commun et choisir des dates pour commémorer cette guerre qui a marqué nos deux nations, afin de rendre ainsi un même hommage à tous ceux qui sont tombés ou qui ont combattu.

 

Le Président de la République et sa majorité ont choisi délibérément le 19 mars, date du cessez-le-feu qui suivi la signature des accords d’Evian pour commémorer la fin de la guerre d’Algérie.

 

Pour qu’une commémoration soit commune il faut que la date célébrée soit acceptée par tous. Or chacun sait qu’il n’en est rien, le 19 mars reste au cœur d’un débat douloureux.

 

Le Président François Mitterrand, lui-même, refusa catégoriquement de reconnaître cette date pour commémorer la fin de la guerre d’Algérie. Il faut dire qu’il avait été un acteur de l’époque, en prise avec ces évènements. Il savait que le conflit n’avait pas cessé au lendemain des accords d’Evian et que la tragédie au contraire s’était poursuivie pendant des mois. Le rapatriement des Français d’Algérie, les victimes des attentats, les exactions contre les harkis, autant d’évènements douloureux qui ne peuvent pas être effacés de l’Histoire officielle et rejetés vers le purgatoire de notre mémoire collective.

Choisir la date du 19 mars que certains continuent à considérer comme une défaite militaire de la France, c’est en quelque sorte adopter le point de vue des uns contre les autres, c’est considérer qu’il y a désormais un bon et un mauvais côté de l’Histoire et que la France était du mauvais côté.

 

Le Président Jacques Chirac avait choisi une date, celle du 5 décembre, pour rendre hommage à tous les morts pour la France de ce conflit.

 

J’ai toujours respecté ce choix, un choix de cohésion et d’unité nationale, car il n’opposait pas deux passés.

 

J’ai moi-même voulu que les victimes civiles ainsi que tous les disparus civils et militaires soient justement associés à cette journée nationale.

 

Je veux que l’ensemble des Français, notamment les plus jeunes, sachent ce qu’ont été les épreuves, l’exil, les déchirements des Français d’Afrique du Nord, car les appelés, les rapatriés et les harkis gardent un souvenir douloureux de cette année 1962.

 

La guerre d’Algérie a été un évènement dramatique, des hommes et des femmes portent encore dans leur souvenir comme dans leur chair la trace de cette Histoire vivante, ne déclenchons pas une guerre des mémoires.”

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